mardi 4 juillet 2017

TO3851 - 4 juillet : le temps du retour

Faudrait être plus méfiant. Mieux assuré. Ne pas hésiter à rester dans l'avion, menotté au siège, en réclamant l'asile aéronautique. Ou cesser d'aller se foutre en l'air une bonne fois, rester sur son cul, dans un fauteuil vert profond en diable ! 
Voilà que mon doigt avait atterri ce soir là (c'est sans doute un soir, toujours un soir, qu'on se décide avant un bon matin) sur une annexe de disneyland posée loin au nord. Une île.  L'insularité, me direz-vous, mais pourquoi pas ? 


Alors sans trop faire gaffe, un peu content même, je m'étais risqué dans les allées de l'aéroport. Bientôt je déambulais en ville, ah, la ville... 
Dans un café où j'avais coincé mes fesses le temps de respirer entre l'averse et le grésil, deux japonaises extatiques prenaient en photo leur assiette. Le plat dégustation se composait de quelques minuscules bouts de poisson ainsi que de morceaux épars d'un truc blanc et souple. Un peu de crème. Le must culinaire. 
C'est peut-être là qu'il aurait convenu de rendre les armes, okay okay, je vois venir, merci, biss'lama. Fuir, ou signer pour dix jours de grand frais, grelottant tout habillé, deux chemises, pull, veste, en plus du sac de couchage, et malgré la tente ? C'est pas bien grave d'accepter ses torts. 
Coucher les cartes. Laisser la mise, remettre son mou, sortir sans regret... 


Azimut brutal et impréparation la plus absolue. Car avec un peu de chance, qui sait ? Ça peut, ça doit marcher. Et de fait : ça passe. On est bien haut, bien plantés dans la neige, mais effectivement : ça passe. Si le vent, le froid, les précipitations veulent bien, alors ?
Sers tes poings dans tes poches. Vise devant, le pas qui vient, puis le suivant. Rien d'autre n'importe.
Après tout chuis grand désormais, je peux faire de grandes conneries, m'égarer de long en large !


Arrive un terme : quand t'as bien pris la pluie glacée, bien baisé tes pieds jusqu'à l'os, éclot l'idée du retour. Me voilà rendu en ville, affamé. Ne lâchant un sandwich que pour une barre chocolatée, avant de me précipiter sur un hot-dog. A l'aéroport, narines frémissantes et gigot dans le sac, me jetais une double pizza absolument grosse et grasse. Alors, oui, ça allait un peu mieux, ah... 


Revoilà Paris. 
L'espace d'un instant la ville paraît trop calme. Bars vides, rues tranquilles. Trois terroristes campent sur des transats et jouent au dés, devant Notre Dame. L'air, bien que frais, offre déjà la promesse d'une tiédeur bienveillante. 


En fait il y a bien longtemps que je ne suis plus vraiment rentré ni tout à fait parti. Un peu absent et du voyage et du faubourg, je fouisse et cherche la cachette qu'il faut, dans le non lieu intermédiaire. 
Dans le souffle turbulent entre deux avions, zone mortelle à tout engin volant, on raconte que s'épanouissent quelques lépidoptères bien particuliers. Jamais repus de ces violences, jamais rendus nulle part, ils vont et viennent chaotiquement au dessus des zones d'envol. Piste d’atterrissage, de décollage ? Ce ne sont plus que des pistes de survol. De non retour.