lundi 26 mars 2012

TG 585, TG 944 & AF 1905 - 26 mars : Hello, tuk-tuk !?!

C'est la nuit. Le ventru est fin raide 
mort saoul et endormi : mission accomplie. 
Mais le retour sera une autre paire de manche.

C'est un voyage qui se termine sur la ligne J, départ Saint-Lazare
s'achève dans un 175, poussif et bondé, quais de Seine, nous voilà !
il faut bien arriver quelque part... Le faut-il vraiment ? En fait, je ne sais pas. 
Le bus ralentit, 4 ou 5 roues se détachent et vont s'égailler dans l'eau de baignade. C'est le terminus. Un mot brutalement latin. On tombe par les portes ouvertes. Fin du trajet...


J'imagine la ville, différente
je t'imagine, différente, et tout à la fois : semblable, identique
j'imagine ces jours et ce soleil, j'oublie, je recommence,
un détail, une fontaine, je reprends tout
j'imagine mais continue aussi : être, sembler, paraître
vaquer dans la ville, cette ville, notre ville,
ni succès ni talent, ni loups, ni pierre...

Avant ce retour, ou ce départ, on ne compte plus,
comment savoir, où situer l'origine, la destination ?
Avant le mouvement, on a réunion avec Riri, Fifi, et Loulou
Bon les gars, je leur fais, les petits hommes. Ce monde est vaste et rond. Vous partirez en voyage d'affaire. Me suivrez, un jour. Mais pour aujourd'hui, et là, ils commencent à rechigner, je conclue très vite, me saisissant de la valise, c'est maman qui vous garde!, oui ?
et je file en riant et battant les bras, pour gagner de la portance


je pense souvent en ce moment à nos manières apparemment opposées mais finalement très proches de fuir notre doute existentiel. Tu as l'air d'un gars bien détendu, plein de vie et d'humour, j'ai pu me dire par le passé merde alors pourquoi lui il a l'air si détendu, si libre, si léger et pourquoi moi je me tape toute la gravité, le sens des responsabilités écrasantes, pourquoi moi j'ai moins d'humour, je prends pas la diago, je m'envole pas comme ça ?

Les lutins ont fait signe d'acquiescer vaguement. Enfin, il m'a semblé. Alors je file, sans demander mon reste. "Saluer à la Khmer", comme on dit.
D'autant que Rémi m'a cédé une pièce magique. 500 dol qu'il suffit de lancer : POF!, et tu voyages. Face, c'est Buenos Aires. Pile : Djakarta. Je lance.

Elle retombe
et tourne, tourne, tourne
puis s'arrête : tranche !
Alors plutôt que tenter l'ubiquité on vise un point sur le globe lumineux, pas trop loin, et hop. Ferme les yeux. Tu vois. C'est le départ... C'est la fin...


Mais en fait plus ça va plus je me dis que tu es dans la même merditude que moi. Je te vois toujours en fuite, dans le besoin de séduire, de baiser, de voyager, besoin de nouveauté. J'ai l'impression que cette frénésie te fait croire qu'ainsi tu t'échappes à toi-même, qu'ainsi tu restes vivant. Compulsion, frénésie...

De même que la pomme de Newton, ou le tranchant de Caïn, l'avion choisit souvent de s'abattre. Au sol. Ici ou là. Désormais les carcasses noircies jonchent nos paysages gavés d'éoliennes. Mais ploum ploum ploum fait le nôtre, en touchant sur trois points
aussi pendant que maman donne la soupe, on ouvre la porte
un air brûlant s'engouffre, nous entorpeurise instantanément
bienvenue dans le piège, la sueur,
bienvenue d'un coup de tampon, et 25 US$ :
la kampuchea republic vous accueille !


La suite ? C'est le voyage. Quel voyage ? L'échappée frénétique ! Une litanie de bars, dollars, avions, possibles, nuits livides en succession de touk-touks et motodoms, ...

Blue Dragon - St Tropez, Pontoon - Dj Club - Chez Gaston - Fun Planet - Rose Bar - Air Force Bar - Happy Man Bar - Tonle Sap Restaurant - Chinese House - Brasserie du Port - Soka Club - Cyrcee - Red Apron - Hush Hush - Atelier Cafe - Sofitel brunch - le Titanic

..., porte des bars qu'on pousse, capsule des bières qui sautent, la liste est longue!, c'est celle des jours de nos vies, petit inventaire auquel s'accrocher. Dernière référence... Vacuité!

Aussi un jour, comptables de nos existences, on rouvrira ce cahier pour en parcourir les pages blanches, secoués de sanglots qu'aucune larme
ne pourra
soulager
Ne pas rester dans la monomanie.
Ne pas remplacer une pseudo nostalgie par un pseudo fantasme.
Essayer de m'ancrer en moi-même. Sentir mes pieds sur le sol.
Laisser mon énergie circuler en moi.
Se sentir exister sans tout cela...

___
D'abord le corps. Non. D'abord le lieu. Non. D'abord les deux. Tantôt l'un ou l'autre. Tantôt l'autre ou l'un. Dégoûté de l'un essayer l'autre. Dégoûté de l'autre retour au dégoût de l'un. Encore et encore. Tant mal que pis encore. Jusqu'au dégoût des deux.

mardi 13 mars 2012

AF 3096 - 13 mars : sans aucun sens, dans toutes les directions

A ce départ il m'attendait -qui?



lui, le même, mon contrôleur
...se faisait les ongles à la sortir du réseau express régional
Sur sa caboche : le même sourire. Et au-dessus : le même regard. On se retrouve comme deux cons; non, comme deux vieux amis ? Il dit : ého, voyageur, on savait tous les deux comment ça allait finir...

alors j'ai lâché 15500 CFA pour la leçon, pour la bonne bouche, et continué vers le 2E, celui qui est tout bois tout béton, et qui parfois se replie et digère les rêves d'évasion.
Mais parfois, cette fois-ci, te laisse filer. On m'y a dit, ok, puis assis, et fasten it, alors les 4 CFM je ne sais plus quoi ont recommencé cette partition pour atmosphère carbonisée et : nous voilà.


Alors que la terre fait quelque tours sur elle même
Alors que comme au ralenti ta tête tombe et rebondit sur l'oreiller
mais en fait c'est très évanescent comme cinématique
alors la capture, le trucage, le ralenti
et l'imagination : font la blague

jour, nuit, jour - trois fois comme ça
vol, atterrissage, perte, choc, rencontres, et : retour
De ce pays, de ces villes, comment dire ?
Tout a été écrit, forcément, indexé, documenté dans les règles, archivé, htmlisé... On trouvera ce qu'on cherche - livre, blog, image, commentaire, témoignage, peinture ?
certains diront, j'aime, j'ai aimé, je crois, d'autres que non, crois-moi, des touristes y renoncent, ne renonce pas, d'autres parcourent en sprint, reste au monde, reste moi
on y vit, on y tue, on y vole,
tout ça est accessible!, partagé!
il y a des gens, ...pourquoi les gens?



Il y a ces mille voyages, et aussi le web profond, un espoir de pensée destructurée, hein, pourquoi décrire l'ici plutôt que tous les ailleurs qu'il inspire ?
Il y a ce mec
qui m'invite à fumer un joint, assis sur un mauvais banc. Buvant un étrange vin en sachet, il rompt une herbe sèche et noire, pleine de graines. C'est pas encore dimanche et déjà mon looser de toujours, bientôt ami pour la vie,
bientôt courir,
bientôt s'enfuir derrière la ligne d'horizon,
quand toubabou pas gentil, lui toujours faire ça 



A ce retour le chauffeur du bus se marre
éh!, le blanc!, t'es pressé le blanc !
il ajoute : t'as la montre, mais jamais le temps !

Et fonce sur la piste, sur le bord, dans les trous de la chaussée, la savane brûle, la lumière tombe, nuit naissante, premiers moustiques qu'on écrase tout doucement en demandant pardon



A ce retour, un croissant, un pain au chocolat, je vais serrer l'oreiller et le souvenir encore prégnant du continent soleil, laisser s'égailler en rêve ce trop plein de sensations

A ce retour, je perds mon livre. Damnation !
Comment saurais-je qui a tué qui ?
 Pourquoi ? Où ? Quand ? Comment ?
C'est souvent comme ça que ça arrive. Encore assis dans l'avion, émergeant de quelques heures de sommeil inconfortable, un schtonk discret se fait entendre. Le cerveau peine à analyser. 
Voyons : chute d'objet ? Derrière moi ? Où personne n'est assis ?


Et ainsi, régulièrement, quelque objet s'en va vivre une autre vie que la mienne. A ce retour. Toutes ces pages. Livre encore frais. On commençait juste à en lécher les petits caractères. Sur la jetée de Ségou. Vue sur le Niger. Vent fort. Foule, pirogues chargées à bloc. Ribambelle d'ânes.
Fichu bouquin qu'il faudra continuer d'inventer seul.
Fichu brouillard.
Fichu retour !



A ce retour, c'est l'aube. RER bondé. Tous les besogneux du petit matin. Et le brouillard. Peinent et soufflent. Train magique. Paris, Paris. Et une heure recouchée. File ! Emmène-moi presser un oreiller, 2 oranges, digérer le touch down avant la remise des gaz...

___
Le coeur à soi quand on est un peu bu de fatigue vous tape le long des  tempes. Bim ! Bim ! qu'il fait contre l'espèce de velours tendu autour de  la tête et dans le fond des oreilles. C'est comme ça qu'on arrive à éclater un jour. Ainsi soit-il ! Un jour quand le mouvement du dedans rejoint celui du dehors et que toutes vos idées alors s'éparpillent et vont s'amuser enfin avec les étoiles.